centrede notre métier. Ainsi, j’ai pu observer ou vivre à chaque stage une situation en relation avec la thématique suivante: «la juste distance dans la relation soignant-soigné». Que nous le voulons ou pas, lors des soins prodigués à nos patients nous sommes inévitablement confrontés à des relations de proximité. Quelle posture
1Le tatouage est le résultat d’une injection d’encre dans la peau produisant un motif indélébile et aussi, le plus souvent, le résultat d’une interaction entre un tatoueur et un tatoué. Les motivations qui président à cette modification corporelle permanente peuvent être esthétique, symbolique, identitaire, religieuse ou initiatique. Selon les époques et les endroits du monde, le sens conféré au tatouage varie. Le tatouage traditionnel japonais est négativement connoté car il servait de sanction aux criminels et mafieux Yakuza qui se sont appropriés cette pratique, devenue rite initiatique et symbole de fierté, pour se reconnaître. 2Le mot tatouage vient de tatau », frapper en polynésien le préfixe ta » signifie dessin inscrit dans la peau », et le mot atua », esprit. Traditionnellement réservé aux chefs et guerriers, le tatouage Polynésien a une origine divine tandis qu’en Orient et Occident, les religions du livre le condamnent. En 787, le Pape Adrien 1er interdit la pratique du tatouage et il faudra attendre que les voyageurs du XVIIIème, comme James Cook, les ramènent du bout du monde comme souvenir sur leur chair. Aujourd’hui présent dans les musées [1], les médias, sur le corps des célébrités, le tatouage touche de plus en plus de peaux et d’esprits Martin, 2016. 3Cette diffusion du tatouage entraîne l’essor d’un nouveau commerce. Le candidat au tatouage devient un client et le tatoueur un commerçant. Le montant de la transaction commerciale dont le tatouage est l’aboutissement peut varier selon les caractéristiques du dessin, des conditions de sa réalisation, de la réputation du tatoueur Rolle, 2012. 4Dans cette étude nous nous sommes intéressés aux particularités que présente le marché du tatouage comme consommation de l’art. De fait, une fois acheté, c’est-à-dire réalisé, le tatouage perd toute valeur pécuniaire. De plus, la relation client-commerçant construite autour du tatouage est tout à fait singulière c’est l’objet de la recherche ethnographique que nous avons menée dans cinq salons de tatouage franciliens. 5Pour mener cette enquête il nous a d’abord fallu justifier notre présence dans ces établissements réservés aux consommateurs de tatouage. La posture consistant à se présenter comme observateur fut peu concluante dans le premier salon car incomprise par les différents acteurs. Dans un autre salon nous avons souhaité interroger directement l’unique tatoueur au cours d’un entretien semi-directif sur son parcours, sa vision du tatouage, ses pratiques, sa clientèle, ses concurrents et collègues. Pour les trois autres salons nous avons profité de l’occasion d’accompagner des clients afin d’être au plus près d’une séance d’encrage. Nous avons ainsi adopté des méthodes de recherches qualitatives avec notamment la tenue d’un carnet de terrain contenant observations, descriptions, ébauches d’analyses et retranscriptions de paroles stratégies d’approches6Pour intégrer la communauté des tatoués, il faut trouver le professionnel qui aura la tâche d’encrer sa peau. Les demandeurs de tatouages utilisent différents critères de choix, comme la spécialisation du tatoueur, le prix, ou la renommée du salon. En effet, la norme est qu’un tatoueur, apprenti ou confirmé, exerce dans un lieu normalisé, déclaré en préfecture, et remplissant des conditions d’hygiène règlementaires. Ainsi, les prémices de la relation tatoueur-tatoué se font à l’entrée du l’organisation du salon. Répartition de l’espace7Nous avons pu systématiquement observer la présence d’au moins deux espaces, celui de l’accueil et celui de l’encrage, séparés par un comptoir permettant l’accueil des clients et l’exposition des books » [2]. Le comptoir est tenu par le propriétaire, un tatoueur, ou une personne embauchée spécifiquement, qui a le rôle essentiel d’assurer le premier contact avec le client. L’espace d’encrage est généralement dissimulé de la vue de tous pour respecter l’intimité des tatoués et la concentration des tatoueurs. Il comporte plusieurs postes de tatouage pour que plusieurs tatoueurs opèrent simultanément. Il peut exister un troisième espace, consacré à la rencontre entre le tatoueur et le futur tatoué qui négocient les modalités du projet. Les différents espaces sont pensés et décorés dans le but d’attirer le client, de le mettre à l’aise, mais aussi et surtout de donner une image à la fois professionnelle et montrer professionnels et rebelles8D’après Valérie Rolle 2013, les salons de tatouages choisissent leur décoration selon différentes logiques technicienne, propre et rangée en gage de sérieux ; créative, mettant en valeur les réalisations des tatoueurs ; anti-conventionnelle, mettant en exergue l’esprit rebelle de la pratique. Nos observations corroborent ces conclusions. L’un des salons observés, aux murs blancs et à la décoration épurée, affiche également les dessins des tatoueurs, suivant simultanément les logiques technicienne » et créatrice ». D’autres salons exposent des objets étranges, dignes d’un cabinet de curiosités. Les images provocantes et les motifs rebelles comme les têtes de morts, n’ont pas l’air d’étonner ou de mettre mal à l’aise les clients, puisque confirmant l’aspect rock n roll » du tatouage. La clientèle semblait néanmoins davantage diversifiée en termes d’âges et de catégorie sociale, dans un salon ayant adopté sobriété et neutralité ce que j’aime bien c’est que ça soit blanc épuré » témoignage tatoué. 9Les salons doivent faire attention à satisfaire tout le monde, ou du moins à ne heurter personne. Il apparaît important de donner aux clients à la fois une impression médicalisée » pour gagner leur confiance, tout en gardant l’aspect rebelle de l’expérience Rolle, 2013.Pour se vendre et vendre son artL’enjeu de la crédibilité10Dans le discours des employés des salons de tatouage, nous retrouvons la nécessité de faire figure d’expert » Rolle, 2013 en mettant en exergue la supposée incompétence des concurrents, dont on dit qu’ils font ce qu’ils ne devraient pas faire » comme des motifs impersonnels issus d’internet et qu’ils ne font pas ce qu’ils devraient » comme avoir des tatoueurs aux styles différents dans un même salon. 11Pour être respecté et respectable, l’un de nos tatoueurs souligne qu’un tatoueur doit être tatoué et de manière visible, sans quoi sa crédibilité sera mise en cause il sera soupçonné de n’avoir fait ni l’expérience de la douleur ni celle du regard social les gens devaient se dire ha c’est bizarre t’es tatoueur et t’as pas de tatouage’ » témoignage tatoueur. Par ailleurs, le tatoueur doit à la fois se montrer disponible pour accueillir des projets d’encrage élaborés, tout en montrant une activité importante, gage de qualité. Cet équilibre subtil entre disponibilité et non-disponibilité lui permet notamment de sélectionner sa clientèle en évitant par exemple de réaliser des street tattoo [3] ». En effet, les tatoueurs sont critiques d’une clientèle de non-sachants, consommant le tatouage par effet de mode sans en connaître la culture, l’histoire ou les implications C’est des gens qui ne connaissent rien au monde du tatouage, la plupart viennent sans projet et veulent juste avoir un tatouage, c’est juste un effet de mode » témoignage tatoueur.Véhiculer des valeurs de confiance voire de fidélité12Les échanges se mettent en place dès l’accueil, sur un ton amical et ponctué de plaisanteries, avec une automaticité du tutoiement. Un tatoueur nous explique que l’acte de tatouer est une pénétration dans l’intimité de la personne et que le projet du tatoué devient celui du tatoueur ce partage est matérialisé par le tutoiement. Nous avons constaté que les conversations dans les salons basculent souvent dans l’ordre de l’intime, soulignant la force du lien entre le tatoueur et son client et expliquant que certains clients reviennent régulièrement, jusqu’à développer une relation de fidélité. La confiance est ainsi au cœur de la relation tatoueur-tatoué, de la négociation du projet d’encrage à sa réalisation. Cette confiance devient une nécessité lorsque l’on considère l’asymétrie de la relation tatoueur-tatoué, l’un détenant soudainement un pouvoir sur le corps de l’autre Durão et Roman, 2001.Négociation et ritualité du tatouageLe projet de tatouage13Normes implicites interdits, refus, facteurs à prendre en compte 14Nous avons constaté l’existence de normes implicites, concernant notamment l’emplacement et la taille des tatouages, et plus particulièrement des premiers tatouages. Un tatoueur nous explique que les premiers tatouages devraient être cachés ». Un autre affirme qu’il est préférable que les premiers soient de petites pièces. D’une part, le tatoueur craint que le non-initié ne supporte pas la douleur les grosses pièces seront alors d’autant plus difficiles à terminer, comme nous avons pu le constater chez une de nos enquêtées ». D’autre part, le regard social qu’implique un tatouage visible peut déstabiliser lorsqu’il n’est pas anticipé certains tatoueurs sont réticents à endosser la responsabilité d’être les premiers à encrer une partie visible du corps. Enfin, la localisation des tatouages sur le corps apparaît tacitement réglementée certaines zones sont proscrites par les tatoueurs parties génitales, d’autres sont réservées » à une clientèle initiée » mains et crâne Les premiers tatouages devraient être cachés, ça devrait être comme ça, tu te fais pas tatouer direct sur le cou ou sur la tête. Après si tu vois que le mec a déjà plein de tatouages sur les bras et tout, ouais la tête ça peut être en continuité » témoignage tatoueur. 15Ces éléments confirment l’importance de la négociation des modalités d’encrage entre tatoueur et tatoué selon l’âge, l’appartenance socio-sexuelle et professionnelle Rolle, 2013 En principe je suis personne pour dire non, mais en fonction de l’âge, de ses antécédents dans le tatouage, est-ce qu’il en a déjà beaucoup ou pas du tout. Je pose souvent la question de leur travail, est-ce que ça va pas les gêner dans leur travail, il faut penser au regard des autres » témoignage tatoueur. 16D’après notre étude, d’autres facteurs sont également pris en compte comme la couleur, texture et apparence des et l’empreinte du tatoueur17La banalisation du tatouage fait apparaître des motifs-types, devenus des basiques ». Les tatoueurs critiquent ces anti-projets », qualifiés de copié-collétatoué », et renvoyés aux faux tatoueurs » Héas, 2013 mais aussi aux faux tatoués ». En effet, le tatouage conserve cet aspect de quête de marginalité et le risque de ces tatouages communs est de faire disparaître la convention tacite de refuser le conventionnel. Pour que les tatouages soient uniques, respectant ainsi les codes culturels et identitaires, les tatoueurs laissent leur empreinte dans la recherche d’originalité et le démarquage si c’est un truc que tu sors d’Internet on va vouloir te le modifier qu’il soit un peu plus original » témoignage tatoueur. Les books » permettent au client qui envisage un motif de se familiariser avec le style du tatoueur. 18Une fois le tatoueur choisi, un premier rendez-vous permet aux deux acteurs de parler du projet. C’est au rendez-vous suivant, celui de l’encrage, que le client découvre le dessin de ce que sera son futur tatouage, qui doit plaire au millimètre près le client doit exprimer exactement ce qui lui déplaît pour que le tatoueur puisse apporter les modifications nécessaires de l’emplacement, de la taille, ou du motif. 19Un tiers accompagne souvent le futur tatoué nous avons pu tenir ce rôle à trois reprises ; il donne son avis, aide le client à exprimer ses éventuels doutes et rassure. Le tatouage est donc le résultat d’une négociation entre le tatoueur, le client et un proche Lo Sardo, 2009.Implication de l’encrage. Gérer la posture et la douleur20Une fois les négociations terminées, le tatoueur positionne le stencil » [4] du tatouage sur la peau du client préalablement désinfectée et rasée si nécessaire. Tatoueur et tatoué doivent désormais négocier la posture qu’ils adopteront pendant l’encrage afin d’être confortables et d’éviter crampes ou gestes brusques. La douleur varie selon les individus, mais aussi selon les parties du corps. Le tatouage peut ainsi être considéré comme un acte masochiste où se côtoient douleur, plaisir, excitation et addiction Rioult, 2006 On les torture et ils aiment ça, et ils reviennent en plus » témoignage tatoueur. 21Si la douleur est trop intense, les réactions de la personne sont imprévisibles, dérangent et ralentissent le travail du tatoueur. Le tatoueur de l’une de nos observées qui gigotaient par souffrance l’avertit que son tatouage risquait de ne pas être symétrique si elle continuait. Des pauses permettent aux deux acteurs de se reconcentrer. Le tatoueur endosse ici de nombreuses responsabilités et un rôle d’apaisement du client pouvant faire émerger à leur relation intime un caractère thérapeutique Durão et Roman, 2001. à la fin, le tatoueur emballe le tatouage dans du papier cellophane que le tatoué devra enlever dans les heures qui suivront, et accompagne son client à l’accueil pour le faire régler et lui prescrire les soins à retouches et l’ancrage social quotidien22Un tatoueur nous explique que le tatouage représente l’intrusion d’un corps étranger dans la peau, et que l’encre aura tendance à dégorger dans les jours qui suivent l’encrage. Le client est ainsi amené à revenir pour faire les retouches nécessaires, incluses dans le prix. Ce service après-vente » renforce l’analogie avec une transaction commerciale. 23Le tatouage transforme d’abord le quotidien immédiat il faut hydrater régulièrement le tatouage pour permettre la cicatrisation Lo Sardo, 2009, qui provoque des démangeaisons qu’il faut contrôler. Le tatouage modifie ensuite le quotidien sur le long terme, il réajuste les choix vestimentaires à travers un jeu d’inhibition et d’exhibition selon le contexte social. Il transforme également les interactions sociales, à base de compliments ou de questionnements. Enfin, le tatouage est un rite de passage qui agrège l’individu à une nouvelle communauté Van Gennep, 1909 traduisant ainsi une volonté de devenir Autre » Je trouve vraiment que le fait d’être tatoué te fait appartenir à une autre communauté » témoignage tatoué. En outre, si le corps est l’interface entre soi et l’autre » Le Breton, 2010, le tatouer permet de se le réapproprier, de s’individualiser et d’influer sur l’image que peut avoir l’autre de soi Le Breton, 2006.Conclusion24Cette recherche ethnographique porte sur un échantillon limité et aurait gagné à être étendue à d’autres salons. Pour autant, il nous est apparu très vite difficile de justifier la présence d’observateurs dans un salon de tatouage on nous a, à plusieurs reprises, fait bien comprendre qu’il s’agissait d’une intrusion. Nous avons eu l’occasion de nous placer dans la position d’accompagnateur, plutôt que dans celle d’observateur. Ceci nous a permis d’approcher au plus près de la relation tatoueur-tatoué, et de mieux en saisir certaines spécificités qui nous auraient autrement échappé. Il résulte ainsi de cette recherche que la confiance est au cœur de la relation tatoueur-tatoué et permet la mise en place de négociations de l’ordre de l’intime chaque séance d’encrage laisse une trace dans le corps du tatoué, mais aussi dans celui du tatoueur. » Rolle, 2013 p. 97. lRemerciementsÀ Léo Tillard pour sa participation à cette étude, Marie Rose Moro pour m’avoir offert l’opportunité de publier ce travail, à Laelia Benoit pour ses conseils et encouragements. Notes [1] Exposition tatoueurs-tatoués » au musée du quai Branly Jacques Chirac en 2014-2015. [2] Les books sont des albums photos qui renferment les réalisations des tatoueurs. [3] Petites pièces faciles et impersonnelles sans délai de réalisation. [4] Pochoir en anglais, c’est un calque qui permet de transposer le dessin sur la peau afin que le tatoueur suive ces lignes au cours de l’encrage.
Cest le tutoiement. Lorsque je vois un client pour la seconde ou la troisième fois, je le tutoie. Sauf bien entendu quelques personnes âgées qui pourraient interpréter
Celapeut paraître anodin et accessoire mais voilà une mesure qui paraît indispensable : il faut bannir le tutoiement lors des contrôles d'identité. "Il convient, affirme le ministre de l
LesProjetlysien·ne·s bénéficient de deux jours par semaine de télétravail, une institution ici. Cela nous a aidé lors du confinement, car nous sommes tous habitués à travailler à distance et nous bénéficions de tout l’équipement nécessaire à notre confort. Le tutoiement est de mise pour tout le monde car nous sommes proches
Dansma pratique, je pose l'usage du vouvoiement comme un dogme, mais je me garde aussi de rester crispé sur cette position; mais cela va dépendre uniquement de la qualité et de l'histoire de la relation qui s'est construite avec le patient, c'est à dire si, et seulement si, le tutoiement, ou l'usage du prénom, en devenant possible apporte quelque Cesdeniers jours je lis ça et là des articles sur l'usage du tutoiement envers son responsable, ses collègues dans le cadre professionnel, et les avis partagés sur la question. Cela me ramène bien évidemment à mon secteur d'activité quant à l'usage de ce tutoiement envers les personnes handicapées, âgées, dépendantes lorsque l'on est . 96 170 197 41 177 166 126 89

qu implique le tutoiement dans une relation